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Spécial Thèse


Deuxième partie

La position spéculaire
Contexte méthodologique d'une analyse des médiations interactives

1 La méthode: Lecture événementielle et position spéculaire
2 Les constituants des dispositifs interactifs
3
Evénementialité de la médiation

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1 La méthode: Lecture événementielle et position spéculaire

Après plusieurs approches sur la manière de rendre compte de l’usage des médiations interactives, il nous paraît difficile de l’aborder à partir de la position opératoire de l’acteur sans entrer d’emblée dans la sphère symbolique. L’opération inverse (saisir l’usage à partir des productions symboliques) est encore moins tenable.

Lorsque par exemple on s’essaye à analyser le contenu d’un écran d’ordinateur comme une image télé sous prétexte que c’est un écran cathodique qui la diffuse, on se trompe. L’image télé est globale, elle mixe figure et fond sans distinction d’usage. L’image d’ordinateur est discontinue du fait de son usage. Dans un environnement graphique * les éléments de l’image n’ont pas la même valeur d’usage. Certains ne sont qu’illustratifs tandis que d’autres ont une valeur fonctionnelle. L’utilisateur, pour faire fonctionner le dispositif hiérarchise et interprète d’un coté une image symbolique et en superposition un ensemble d’objets fonctionnels. L’interactivité change le régime des signes. Le curseur d’une souris se déplaçant sur l’écran, icône ou indice ? Du point de vue symbolique, c’est une icône, du point de vue de l’usage, c’est parfois un indice.

Par ailleurs les technologies numériques transforment les référents du signe. Une photo entretenait un lien indiciel avec son référent. La numérisation de l’image supprime le lien de continuité avec le référent, elle en fait un objet synthétique dont la qualité de la résolution recrée, maintient, déforme ou corrige l’illusion. La puissance et les outils de traitements et de synthèse des représentations font qu’aujourd’hui la forme semble n’être plus qu’iconique. Des dinosaures de Steven SPIELBERG dans le film " Jurassic Park " à une photo de famille en guise de fond d’écran, la représentation n’atteste de sa significativité que par sa valeur d’usage. Il devient de moins en moins possible d’expertiser la représentation des signes sans soupçonner leur falsification. Ainsi au travers des technologies multimédia, l’indice se confond dans l’icône. Tandis que le symbole suit le même chemin en sens inverse. Le choix des polices de caractères, la personnalisation des mises en pages à la portée de tous, font que les documents symboliques contiennent à nouveau les traces de leurs auteurs.

Nous avons jusque là présenté la sphère opératoire et la sphère symbolique comme se réfléchissant l’une dans l’autre. Pour aborder les effets des médiations interactives, nous proposons au lecteur de sortir du cercle infernal en passant par une troisième sphère que nous nommerons la sphère spéculaire.

L’idée de la sphère spéculaire est d’utiliser un troisième plan intermédiaire composé par la juxtaposition des deux sphères.

Pour réaliser cette opération, cette projection vers cette scène imaginaire, nous postulons que pour tout acteur (tout utilisateur opératoire), il existe un personnage (dans la sphère symbolique).

Si la coupure sémiotique est maintenue, il doit exister une différence entre les deux, s’il y a des similitudes, des analogies, la coupure s’efface. Dans ce cas on cherche à savoir quelle est la sphère de référence pour la similitude. Si elle est relative à la sphère de l’acteur (au champ opératoire), il y a un déplacement du personnage vers l’acteur. Le symbolique tend vers l’expérience. Lorsque au contraire, il y a un déplacement de l’acteur vers le personnage, la similitude fait référence à la sphère du personnage, il y a un glissement de l’opératoire dans le symbolique. Dans le premier cas, nous parlerons d’une analogie projection indicielle ou d’un transfert indiciel. Dans le second cas, nous évoquerons une analogie projection (ou un transfert) symbolique.

Mais comme nous l'avons énoncé, cette position est une construction théorique. Notre approche méthodologique a pour but de nous fournir les données nous permettant de (re)-construire cette position. Elle doit nous servir à distinguer les dispositifs de médiations interactives au-delà de leur contenu, mais bien au travers de l’investissement potentiel de leurs discours.

Nous proposons de suivre ce rapport entre l’acteur et son personnage au travers de plusieurs dimensions de l’usage et de considérer les liens entre les sphères opératoires et symboliques comme constitutifs de cette position originale. Nous supposons que ces relations opèrent une mise en scène à partir d’effets médiatiques.

L'étude de la construction du discours des médias non-interactifs pouvait se faire en prenant pour référence absolue l'inscription de l'énoncé indépendamment de ses utilisateurs. Par exemple en découpant un livre en page ou phrase, le film en durée et en plan. Les médiations interactives n'ont pas un énoncé absolu. L'énoncé est le fait d'un événement de l'usage du dispositif.

L'approche des énoncés interactifs se fait à partir d'une lecture événementielle. Ceci implique que du point de vue méthodologique, nous commençons notre observation à partir d'une interaction communicante entre un acteur et un système. L'ensemble des éléments symboliques (comme les graphismes présentés à l'écran d'un ordinateur) et opératoires (les éléments d'interfaces comme un clavier) nécessaires à cette interaction constituent le dispositif.

Le point de départ de nos observations est celui de l’ouverture de la médiation. La médiation interactive, ne commence qu’à partir du moment où il y a coïncidence entre l’action de l’utilisateur avec une transformation de l’énoncé, la transformation de l’énoncé désigne le personnage. Ce qui ne devra en aucun cas occulter le contexte socio-technique où se produit la médiation.

A partir de là, nous suivons les liens qu’acteurs et personnages entretiennent au cours des événements interactifs suivants, leur rapport identitaire à partir duquel s’organisent leurs relations avec les autres éléments de la médiation.

L’approche est inductive, mais elle correspond à la principale stratégie cognitive par laquelle les utilisateurs investissent les médiations interactives (Seymour PAPERT [28], Sherry TURKLE [29], Patricia GREENFIELD [81] ou Jacques PERRIAULT [82]

En reprenant l'approche des dispositifs interactifs selon Luc-Olivier POCHON et Michèle GROSSEN, nous nous plaçons en position d'étudier le déroulement syntaxique et sémantique de la médiation en suivant l'hypothèse d'une construction d'une intersubjectivité au travers d'un processus d'adaptation réciproque du modèle de conception et du modèle de l'usager" [71].

Ceci sous-entend que la médiation interactive se déroule suivant un ensemble de rendez-vous entre l’opératoire et le symbolique. Nous qualifions ces rendez-vous d’événements définis par une action d’un des acteurs de la médiation transformant les objets symboliques de la représentation. Les transformations que nous considérons comme significatives sont celles qui seront reliées à des actes. Une image changeante nous intéresse lorsque nous sommes capables d'identifier l'acteur de sa transformation.

Nous imaginons aussi que cette approche événementielle du dispositif fait varier la définition de ce dernier au cours de la médiation. L’interprétation symbolique de certaines actions peut évoluer au cours de la médiation (sous l’effet de leur auto-perception par l’acteur, l’évolution des compétences de ce dernier, la transformation de leur interprétation par le dispositif…).

En quelque sorte, notre approche propose d'identifier une situation initiale et de suivre les conditions de ses transformations. Nous analysons par quels intermédiaires (opératoires et symbolique) de la représentation et du dispositif un acteur agît sur l'énoncé ou une partie de celui-ci. A partir de ce corpus de relations, nous envisageons de comprendre comment les différents acteurs de la médiation interactive s'approprient leur(s) rôle(s).

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©Vincent Mabillot 1999-2003